Paroles d'expert 3 min

Polimotor 2 : des plastiques sous le capot

Umberto Bianchi, responsable Marketing et Communication de la division Solvay Specialty Polymers explique pourquoi son entreprise a décidé de relever le défi du Polimotor 2 en participant à la construction d’un nouveau moteur en plastique.
Polimotor 2 : des plastiques sous le capot
Polimotor 2 : des plastiques sous le capot

Qu'est-ce qui motive la participation de Solvay à la réalisation d'un bloc moteur en plastique ? 

Dans les années 80, l'ingénieur américain Matti Holtzberg avait conçu le Polimotor, sur la base d’un moteur Ford 2,3 litres dont plusieurs éléments métalliques, en fonte, avaient été remplacés par du Torlon, un polyamide-imide, très solide et résistant à la chaleur, produit aujourd’hui par Solvay. 
Ce premier Polimotor a fonctionné mais n'a jamais été installé dans une voiture de série. Sans doute parce qu’à cette époque, les utilisations de ce polymère dans les mécaniques complexes étaient encore limitées en raison de difficultés de moulage. 
Solvay est évidemment enthousiaste à l’idée de relever de nouveau ce défi avec la construction du nouveau Polimotor 2 qui va être testé dans une voiture de course l’an prochain. Nous sommes d’autant plus motivés qu’il dispose aujourd’hui d’un éventail de solutions beaucoup plus étendu.

Quels sont vos atouts, aujourd'hui ? 

À la différence du projet initial qui misait sur un seul polymère, nous souhaitons tester une large gamme de plastiques de haute performance.
Avec le projet Polimotor 2, nous remplacerons au moins 10 composants métalliques du moteur par des pièces fabriquées à partir de sept thermoplastiques de haute performance. En plus du polyamide-imide Torlon que nous n’avons pas abandonné, nous testerons aussi l’Amodel, un polyphthalamide, le KetaSpire, un PEEK, le AvaSpire un PAEK, notre PPSU Radel, ainsi que le Ryton, un sulfure de polyphénylène et des fluoroélastomères Tecnoflon. La plupart de ces polymères qui n’étaient pas disponibles dans les années 80 sont désormais utilisés dans l’industrie automobile, en remplacement de pièces métalliques, notamment.

Qu'attendez-vous de cet arsenal, sur le plan technique ?

Au-delà de l’écho rencontré par le challenge, ce projet collaboratif devrait ouvrir la voie à des ruptures technologiques dans le secteur automobile, en s’inscrivant dans la logique d’allègement des véhicules qui est désormais l’obsession de tous les constructeurs qui veulent être les premiers à répondre aux futures normes d’émissions de CO2.
Or, jusqu’à présent, le moteur qui est très majoritairement constitué de métal est la pièce la plus lourde d’une voiture. 
En tant que premier fournisseur mondial de polymères de haute performance pour l'industrie automobile, Solvay a intérêt à démontrer qu’il dispose de solutions pour répondre à ces enjeux environnementaux… Et donc aussi aux défis techniques qui vont dans ce sens.

Plus concrètement, nous avons chiffré nos ambitions : le premier Polimotor de la Ford Pinto pesait 70 kg contre 188 kg pour son homologue en métal. Nous avons l’ambition de construire un moteur pesant entre 63 et 67 kilos, soit 40 kg de moins qu’un moteur actuel de même cylindrée.

Quels éléments métalliques du moteur seront réalisés avec vos polymères ? 

Les sept matériaux thermoplastiques que j’ai listés doivent permettre de remplacer au moins 10 composants métalliques du moteur : la pompe à eau, la pompe à huile, les entrées et sorties d'eau, le boîtier papillon, la rampe d'injection et les pignons. Cependant, le métal sera encore utilisé dans le Polimotor pour les quatre chambres de combustion et les alésages de cylindres qui sont usinées mécaniquement.
Notre nouveau bloc-moteur est conçu pour être testé en compétition, en 2016, sur une Norma Concept M-20, c’est-à-dire un type de voiture destiné à des épreuves d’endurance, lors de la course « Lime Rock Park » dans le Connecticut aux États-Unis. Il est évidemment que nous visons, dans la foulée, des applications dans l’automobile grand public.

Quelles sont les applications industrielles envisageables rapidement ?

Deux éléments pourraient certainement être d’ores et déjà fabriqués avec des polymères haute performance. Il s’agit des entrées et sorties d'eau reliées au circuit de refroidissement et du boîtier papillon qui permet alors d'envoyer de l'air dans le moteur par un système de clapet mobile.
Mais notre approche ouvre sans doute de nombreuses autres alternatives pour les moteurs classiques comme pour les moteurs hybrides et, même les véhicules électriques.
Nous avons été contactés par plusieurs équipementiers mondiaux qui s’intéressent aux avancées du projet Polimotor 2 et sont impatients de savoir comment ils pourraient appliquer cette technologie aux plates-formes de leurs véhicules.

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