Techno du futur 5 min
Polymères : un pas de géant vers la miniaturisation
Avec la mode des nanotechnologies, parler miniaturisation peut paraître bien désuet. Et pourtant, le dossier est encore loin d’être clos, notamment dans le domaine de la santé.
Polymères : un pas de géant vers la miniaturisation
Polymères : un pas de géant vers la miniaturisation

Quand les polymères se font un film

Petit, petit, petit tout est petit dans notre vie

Processus de création qui permet de concevoir des produits de plus en plus petits, la miniaturisation est déjà une histoire ancienne qui n’a cessé de s’accélérer depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et l’apparition des premiers transistors, eux-mêmes rapidement supplantés par les circuits intégrés. Car, s’il est vrai que l’essor de l’électronique va généralement de pair avec l’emploi du silicium, ce serait faire injustice aux polymères que de les oublier. Sans eux, la course vers la miniaturisation aurait atteint ses limites dès la fin du XXe siècle et ce superbe smartphone – ô combien indispensable dans notre monde moderne ! – qui tient dans la poche n’existerait certainement pas.

Les polymères secouent les puces de l'électronique

Au début des années 2000, les fabricants de puces s’inquiètent. Selon la fameuse loi de Moore, la puissance des puces double tous les dix-huit mois. Mais, à mesure que les industriels augmentent la densité des transistors sur leurs tranches de silicium, ils se heurtent à une limite d'un autre ordre : le coût des machines utilisées pour fabriquer les circuits. A chaque génération de puces, il faut une nouvelle série d’équipements qu’il devient de plus en plus compliqué d’amortir. Dès lors, pour continuer à renouveler régulièrement son offre, l'industrie de l'électronique n'a pas d’autre choix que d’imaginer de nouvelles méthodes de fabrication, plus performantes et surtout moins coûteuses. A l’époque, l’une des solutions fut trouvée par HP en s’inspirant des méthodes de production des CD. A partir d'un moule maître, les connexions étaient imprimées sur une surface en polymère déposée sur un « wafer » de silicium, simplifiant ainsi le process de fabrication.
 

Cela paraît banal aujourd’hui, mais à l’époque, imprimer directement un circuit électronique sur une fine couche de plastique était un véritable exploit.

Cure d'amincissement pour les plastiques

Quinze ans après les premières impressions de circuits intégrés sur polymère, les limites sont de nouveau atteintes. Cette fois-ci, ce ne sont pas des motifs économiques qui bloquent l’avancée technologique mais le polymère lui-même qui a atteint une épaisseur limite d’une vingtaine de nanomètres. Or, pour progresser, ce dernier doit encore gagner en finesse. Une équipe française du CNRS a peut-être trouvé la solution. Elle vient de mettre au point une nouvelle combinaison qui associe des polymères issus du sucre et d’autres à base de polystyrène. Cet assemblage novateur permet la conception de films ultraminces d’une épaisseur de 5 nanomètres. Ce copolymère a des caractéristiques étonnantes : les chercheurs ont montré qu'une telle structure, semblable à une bulle d'huile connectée à une gouttelette d'eau, était capable de s'auto-organiser en prenant l’apparence d’un film bien plus fin que ne l’étaient ceux des générations précédentes. 

Parvenir à cette performance permet d'envisager de nombreuses applications en électronique souple : miniaturisation de la lithographie des circuits, capacité de stockage de l'information multipliée par six (mémoires flash – clés USB – conservant non plus 1 mais 6 Tbit de données), performance accrue des cellules photovoltaïques, etc.

Une autre équipe a également fait un pas supplémentaire vers la miniaturisation des composants électroniques en créant une nanofibre de plastique capable de conduire l’électricité. Certes il existe déjà des nanotubes de carbone ou encore de composés de particules d’or capables à des échelles aussi microscopiques de conduire l’électricité, mais ces derniers sont encore très coûteux et très délicats à manipuler. Avec ce polymère organique d’un genre nouveau, la course à la miniaturisation franchit une nouvelle étape : les nanomachines de l’infiniment petit alimentées en énergie par ces fibres permettront très bientôt de créer des écrans souples d’une extrême finesse où nous ne verrons même plus l’électronique embarquée : des écrans parfaitement transparents, invisibles et, pourquoi pas, des panneaux solaires ayant les mêmes caractéristiques.

Les cellules solaires à ne pas prendre à la légère

Les cellules photovoltaïques n’ont cessé d’évoluer au cours de ces vingt dernières années ; la dernière en date risque bien de changer définitivement la donne et de révolutionner… notre façon de charger nos appareils électroniques. Cette avancée technologique, nous la devons à une équipe du Massachusetts Institute of Technology (MIT) qui a réussi à mettre au point une cellule encapsulée dans du parylène, un polymère souple, couramment utilisé pour protéger les appareils médicaux et cartes de circuits imprimés, qui se présente sous la forme d’un film plastique dix fois plus mince que du film alimentaire. Pour montrer la légèreté de leur cellule, l’équipe du MIT a tout simplement déposé celle-ci sur une bulle de savon qui, bien entendu, n’a pas éclaté sous le poids. Le processus de création de cette nouvelle cellule photovoltaïque a lieu dans une chambre à vide à température ambiante. La cellule dispose d’un ratio poids/puissance bien plus élevé au kilogramme (environ 400 fois) que les cellules photovoltaïques classiques.

Il sera donc possible, à terme, d’en équiper les dispositifs pour lesquels le poids a une importance cruciale, comme les engins spatiaux ou les ballons d’hélium. Voire, dans un avenir encore plus proche, tous nos appareils nomades.

Mon écran dans la peau

Les geeks sont à quelques encablures de voir leur rêve le plus cher enfin se concrétiser : avoir son écran de smartphone inséré dans la peau et ce, sans souffrir ! C’est en effet ce que promet une équipe de chercheurs japonais qui a élaboré un film électronique transparent, ultrafin et tactile qui se colle à même le corps. Parfait comme capteur biométrique invisible à usage médical ou sportif, cet épiderme électronique pourrait bientôt servir d’écran corporel et remplacer celui des appareils high-tech. D’une épaisseur de trois micromètres, cette seconde peau électronique est étirable, flexible et entièrement transparente. Le film plastique intègre un système d’affichage composé de microscopiques diodes électroluminescentes en polymères ; bref, il a tout d’un écran ! La route est cependant encore longue avant que l’on puisse envoyer des SMS depuis notre peau !

En attendant, de nombreux nanocapteurs biométriques peuvent prendre place dans cette couche de plastique pour mesurer différentes constantes vitales comme les pulsations cardiaques, le taux d’oxygénation du sang, etc. Pas mal, mais ce n’est donc pas encore demain que l’on pourra regarder un film sur le dos de son voisin.

Un diaphragme dans mon smartphone

La bataille des objets connectés est bel et bien ouverte. On connaît la lutte sans merci que se livrent les principaux fabricants de smartphones pour les rendre sans cesse plus légers et plus performants. En tout premier lieu, la qualité de l’appareil photo est désormais un critère de différenciation primordial. Par conséquent, ces fabricants sont à l’affût de toute innovation susceptible d’améliorer les performances photographiques. Une équipe de l’université allemande de Kaiserslautern a mis au point un diaphragme électrochromatiqueélectrochromique offrant la même fonction que le classique modèle à lames, qui aujourd’hui encore fait référence et n’équipe que les appareils haut de gamme. Suffisamment miniaturisé, ce diaphragme pourrait convenir à des smartphones et serait, en outre, très économe en énergie. Les chercheurs ont ainsi réussi à remplacer l’encombrant système à lames par un polymère électrochromatique qui s’opacifie lorsque une faible tension électrique lui est appliquée. Une fois le changement de transparence obtenu, la tension n'a pas besoin d'être maintenue. En disposant plusieurs anneaux de ce plastique en cercles concentriques, on obtient différents réglages de luminosité. Aujourd’hui, le temps de réaction est encore jugé trop long et l’équipe s’affaire donc pour rendre leur diaphragme bien plus réactif.

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