Planète 5 min
Les plastiques veillent au grain
Les exploitants agricoles semblent bien avoir trouvé la recette miracle pour améliorer leurs rendements, et ce en utilisant moins de pesticides et en régulant leur consommation d’eau. Leur formule magique tient en deux mots : plastiques agricoles. Ils ont révolutionné le quotidien des agriculteurs et par conséquent nos habitudes alimentaires… Bien sûr, reste le problème de leur élimination, mais la filière s’organise et gagne mois après mois en efficacité.
Les plastiques veillent au grain
Les plastiques veillent au grain

Les plastiques ramènent leur fraise

Du plastique en agriculture : mais pour quoi faire ?

On a coutume de parler du bon sens paysan ; et l’utilisation des plastiques en est bien la démonstration la plus flagrante. Mais ces plastiques agricoles, comment sont-ils apparus ? Etonnamment on l’ignore, mais les soupçons se portent sur un agriculteur qui, en ayant assez de renouveler le paillage de ses cultures de tomates, aurait eu l’idée d’utiliser des bâches en plastique. Nous étions alors dans les années 1950 et bien loin encore de parler de plastiques agricoles. Le résultat étant à la hauteur de ses attentes, cet agriculteur fit des émules. A tel point qu’aujourd’hui les plastiques agricoles se comptent en centaines de milliers de tonnes en Europe. Outre le paillage, ils sont aussi majoritairement utilisés pour couvrir les serres, pour l’ensilage ou encore pour enrubanner les meules destinées au fourrage.

Le paillage : une technique ancestrale

Les amateurs de jardinage connaissent bien la technique du paillage qui consiste à étendre, en bordure des plants, une couche d’un matériau naturel ou synthétique à même le sol. Cette couche protectrice permet non seulement d’atténuer les effets climatiques – en limitant l’évapotranspiration par exemple – mais aussi d’éviter la prolifération des adventices en tout genre comme les mauvaises herbes. Le paillage n’est pas une technique nouvelle, loin s’en faut. Les maraîchers protègent depuis longtemps leurs cultures. Il y a cinquante ans, ils le faisaient avec de la paille ou d’autres déchets organiques comme des copeaux de bois. Un travail alors fastidieux qui nécessitait une lourde main-d’œuvre. L’arrivée des films plastiques a, n’ayons pas peur des mots, révolutionné la culture maraîchère et fruitière ! Les exploitants ne jurent aujourd’hui que par eux.

L’usage des films plastiques leur a non seulement grandement simplifié la vie mais aussi permis d’améliorer les propriétés organoleptiques et l’aspect de leurs fruits et légumes. Et, cerise sur le gâteau, grâce à eux, leurs revenus ont évolué de façon non négligeable. Ces films sont maintenant incontournables dans la quasi-totalité des cultures : salades, tomates, fraises, melons…

Comme la paille mais en mieux

Une fois posé, le film a une durée de vie de plusieurs mois évitant ainsi les travaux répétitifs. D’une efficacité redoutable face à l’inévitable profusion des mauvaises herbes, ils donnent lieu à une économie d’herbicides qui se compte en tonnes. Ce sont autant de produits chimiques qui ne viendront pas se mêler aux nappes phréatiques. Leur étanchéité est aussi un atout important. Grâce à eux, la terre reste humide. A l’instar des herbicides, ce sont là aussi des millions de mètres cubes d’eau qui sont économisés. Enfin, ces films protègent les cultures, qui ne sont plus souillées par de la terre. Certes, la terre se lave mais elle a un autre effet pervers : déposée en trop grande quantité sur un jeune plant, elle peut nuire à sa croissance voire à son goût. Si aujourd’hui les rayons fruits et légumes de vos magasins préférés proposent des fraises ou des courgettes aux formes si parfaites, le plastique y est pour beaucoup !

Un véritable marché pour l'industrie

Aujourd’hui, les films de paillage ne sont plus des bâches améliorées. Pour les industriels du plastique, l’agriculture est un marché aux larges débouchés et ils s’y intéressent de près en poussant sans cesse la recherche pour trouver le matériau idéal. Pour être simple à mettre en place, il doit être léger et le plus fin possible, et assez résistant pour ne pas se déchirer lors de son retrait. En polyéthylène, les films de paillage sont extrêmement minces – moins de 100 μm d’épaisseur, soit 1/10e de millimètre. La limite semble bien être atteinte, car même si le polyéthylène autorise plus de finesse encore, les films en seraient un tant soit peu plus fragiles et surtout beaucoup plus délicats à manipuler lors de leur récupération, et pourraient avoir tendance à se déchirer. C’est pour cette raison que l’industrie planche actuellement sur de nouveaux matériaux encore plus fins mais aussi plus résistants.

Les maîtres du temps

C’est un fait, grâce à l’utilisation des plastiques, les agriculteurs maîtrisent largement mieux les caprices de la météo. En effet, aux films de paillage viennent souvent s’ajouter des tunnels, des films suspendus à quelques centimètres du sol qui protègent les cultures des intempéries. Orage, grêle, vent, pluies abondantes…, l’agriculteur moderne sait que les intempéries ne viendront jamais plus compromettre sa production. Deux fois plus épais que les films de paillage, les films dits de tunnels sont donc plus résistants. Blancs ou transparents, ils jouent aussi un rôle de serre en emmagasinant chaleur et lumière si propices au bon développement des plantes. De plus, en étant simplement suspendus, ces tunnels de polyéthylène permettent à l’eau de pluie, via un système de rigoles, de « sustenter » les cultures directement en leurs pieds et d’éviter ainsi tout risque de mildiou.

C’est autant de produits phytosanitaires qu’il faudra utiliser en moins : un bienfait pour la productivité de l’exploitation agricole mais aussi pour l’environnement.

Protéger la paille et le grain

Ces grandes bâches de plastique recouvrant un monticule d’on ne sait quoi, on en a tous vu en bordure des champs. Avouons-le, d’un point de vue visuel, ce n’est tout de même pas ce qui se fait de mieux. Mais n’allez pas incriminer les agriculteurs, ou plus exactement les éleveurs, car ces bâches en polyéthylène ont un rôle essentiel dans la pratique de leur activité. Elles permettent de conserver les fourrages et les grains destinés à l’alimentation du bétail. Ainsi stockés à l’abri de l’eau et de la lumière, ces derniers gardent toute leur fraîcheur et donc toutes leurs protéines. L’hiver venu, le bétail pourra continuer à s’alimenter avec des produits naturels. L’éleveur n’est donc plus obligé d’enrichir l’alimentation de son cheptel par des compléments alimentaires pas toujours vus d’un bon œil de la part des consommateurs.

Ce sont d’ailleurs les mêmes films qui servent à enrubanner les meules de foin, et ce, exactement pour les mêmes raisons. Pour en finir avec l’ensilage, ajoutons que certains silos à grains rigides sont fabriqués à partir de polyester renforcé. Plastique et agriculture font décidément bon ménage.

Des serres incassables

On l’a vu plus haut, les films plastiques servent notamment à concevoir des tunnels de culture. Ils sont aussi très largement utilisés dans la fabrication de leurs « grandes sœurs », les serres. L’image de la serre en fer forgé munie de larges panneaux de verre est désormais d’un autre temps. Le verre, c’est lourd, c’est fragile et c’est cher… Aujourd’hui, les couvertures de serres sont réalisées en polycarbonate, un matériau qui a quasiment les mêmes caractéristiques physiques que le verre vis-à-vis de la lumière. Aux Pays-Bas, nation championne de ce type de culture, les serres viennent modeler le paysage, et quand elles servent à la culture horticole, les effets de couleurs et de lumières qu’elles produisent ne peuvent que ravir le poète qui sommeille en chacun de nous…

 

Ceci étant dit, grâce à la culture sous serre, la Hollande est l’un des leaders européens dans le domaine de la production de fruits et légumes avec plus de 3 millions de tonnes par an. En 2011, elle était en tête de la production européenne de concombre (440 000 tonnes), au deuxième rang pour le poivron (345 000 tonnes), au troisième rang européen pour la tomate (660 000 tonnes).

De multiples utilisations

La liste des plastiques utilisés en agriculture est encore bien longue : tuyaux de PVC ou de polyéthylène destinés aux systèmes d’irrigation et de drainage ou de chauffage des serres, du polyéthylène extrudé pour concevoir des filets de protection contre les oiseaux ou rongeurs, du polystyrène moulé pour fabriquer des bacs – réservoirs, auges… –, et même des plastiques recyclés pour les seaux, cageots et autres pots. Les matériaux plastiques ont, grâce à leur faible coût, leur facilité de mise en œuvre et leur légèreté, montré combien ils sont indispensables, pour ne pas dire incontournables. Sans eux, les métiers de l’agriculture seraient bien plus pénibles et… bien moins rentables. Quant aux consommateurs, ils y trouvent aussi largement leur compte, puisque l’usage des plastiques permet certes de meilleurs rendements mais aussi d’obtenir des fruits et légumes aux formes harmonieuses dénués de tout défaut et ô combien appétissants.

 

Cet article vous a plu ? Vous allez aimer les suivants !
  • Travailler ensemble pour mettre fin à la pollution des déchets
    Planète 4 min
    Travailler ensemble pour mettre fin à la pollution des déchets

    Rencontre avec Philippe Montagné, directeur régional projets EMEA (Europe, Afrique et Moyen-Orient) de l’AEPW....

  • Plastique tu es, plastique tu redeviendras
    Planète 4 min
    Plastique tu es, plastique tu redeviendras

    Après une vie de bons et loyaux services, les plastiques ont-ils un avenir ? Qui dit déchets plastiques pense généralement recyclage des emballages. Pourtant, les plastiques se sont imposés dans d’aut...

  • Mes déchets plastiques valent de l’or
    Planète 5 min
    Mes déchets plastiques valent de l’or

    Et si mes déchets en plastiques avaient une valeur, s’ils pouvaient être une ressource, une richesse … ? La prise de conscience est bien là, dans différents pays européens, et nombreux sont ceux qui d...